Jeudi 16 juin, deux classes de 3e du collège sont allées à Septfonds. Cette sortie pédagogique a pu être organisée grâce à La Mounière, la Maison des mémoires de Septfonds et au service départemental de l’ONAC.
Les élèves ont visité dans la matinée l’exposition de la Maison des mémoires consacrée au camp de Judes et le Mémorial du camp.








Les animatrices de la Mounière Margot Nicolle et Romy Barenne ont évoqué le contexte de la création du camp en février 1939 pour interner les réfugiés républicains espagnols fuyant la dictature franquiste, leurs conditions de vie et les politiques anti juives du gouvernement de Vichy. En effet, « de 1941 à l’été 1944, le camp (…) sert à l’internement d’étrangers « en surnombre dans l’économie nationale » et à des Français suspectés d’activités contraires au régime. A l’été 1942, le camp devient le lieu de transfert pour Drancy de près de 300 Juifs étrangers, hommes, femmes et enfants, raflés dans les départements du Tarn-et-Garonne et du Lot. Très rapidement après leur transfert en zone occupée, ces derniers sont déportés à Auschwitz et très peu survivront. » Geneviève Dreyfus-Armand, Le camp de Judes de Septfonds durant la seconde guerre mondiale.







Nous vous encourageons si vous ne connaissez pas le lieu à vous y rendre ! L’application « Septfonds, un camp, des mémoires » et sa fiction audio « Passages, des histoires dans l’Histoire”, est à découvrir depuis le Mémorial du camp de Judes à partir de votre téléphone ou d’un tablette empruntée à La Mounière. Il est préférable de la télécharger avant pour plonger dans les récits d’Alfonso, Angel, Juan, Alejandra, Suzanne, Duval, Sophia ou encore Jacob et Maksymilian. Cette application permet une découverte « immersive et sensible des réalités du camp » à travers l’histoire de ces réfugiés.
L’après midi a été consacrée à une rencontre émouvante au théâtre le Florida à Septfonds avec des témoins de l’histoire de la Maison des enfants de Moissac. Les élèves de 3e du collège de saint Antonin étaient également présents pour cette rencontre exceptionnelle.
Ils ont pu entendre le témoignage de Jean-Claude Simon, fils de Shatta (Charlotte) et Bouli (Édouard) Simon, membres des Éclaireurs Israélites de France, fondateurs de la maison des enfants de Moissac qui ont sauvé de la déportation de nombreux enfants juifs. Jean-Claude Simon, président de l’association Moissac, ville de justes oubliée, a insisté sur la situation atypique de ce refuge. Tous les habitants de Moissac connaissaient l’existence de la maison mais aucun d’entre eux ne les a dénoncé alors que les enfants jusqu’en 1942 allaient à l’école, se promenaient en chantant des chants israélites et jouaient sur la place devant la maison au vu et au su de tout le monde. En 1942, avec l’occupation de la zone libre par les troupes allemandes, la maison a dû fermer et les enfants ont été cachés dans des familles de paysans de la région ou évacués vers l’Espagne ou la Suisse.







Les photographies des enfants proviennent du site de l’Association « Moissac, ville de justes, oubliée » présidée par Jean-Claude Simon.
Puis ce fut le tour de Bernard Fainzang témoin indirect et porteur de la mémoire de plusieurs membres de sa famille victimes des persécutions antisémites de Vichy et de l’Allemagne nazie. La famille Fainzang originaire de Varsovie se réfugie à Lizac, un village proche de Moissac, en 1940. Le grand père de Bernard, Meilech Fainzang l’un de ses oncles Jules et son père Joseph sont arrêtés le 06/03/1942, et internés au camp de Septfonds. Ils y restent jusqu’en août 1942. A ce moment-là, Joseph s’échappe du camp et rejoint la résistance à Marseille. La mère Ides Fainzang demeure à Lizac tandis que les plus jeunes de ses enfants Henri, Daniel et Sara trouvent refuge à la maison de Moissac. Finalement Jules et ses parents seront transférés au camp de Drancy puis déportés vers le camp d’Auschwitz. Jules parviendra miraculeusement à échapper à la mort et survivra à la déportation tandis que ses parents seront assassinés dans les chambres à gaz du camp peu de temps après leur arrivée.










De gauche à droite sur l’estrade du théâtre le Florida : Bernard Fainzang, Jean-Claude Simon et Albert Perelman.
Le dernier témoin fut Albert Perelman arrivé orphelin à l’âge de 9 ans à Moissac en 1945 après la guerre alors que la maison des enfants avait réouvert. Il évoque son séjour de 4 ans comme une véritable embellie après les drames qu’il a vécus durant la guerre et sur lesquels il restera assez discrets. Il se souvient encore de l’odeur de l’uniforme du soldat allemand qui l’avait pris dans ses bras au moment de son arrestation en 1942 avec sa mère.
Tous ces témoins ont ensuite répondu avec beaucoup de bienveillance aux questions posées par les élèves.
- Léo Pignol, l’un des plus anciens blogueurs du blog de Frago et aujourd’hui étudiant en journalisme au pôle universitaire de Vichy est venu au collège interviewer Timothy (lui-même blogueur du BDF) qui a participé à la sortie. Voici un extrait de leurs échanges :
« Qu’as-tu retiré de ces témoignages ?
– Les témoins vivent toujours avec leurs souvenirs qui datent de plus de 80 ans, c’est toujours difficile pour eux de témoigner. L’émotion est palpable. Certains en font encore des cauchemars. Ce qui s’est passé à Moissac est incroyable, c’est un cas exceptionnel : 650 enfants juifs cachés, tout le monde savait qu’ils étaient là et personne ne les a dénoncés.
En quoi est-ce important que de tels témoignages soient donnés à des jeunes comme toi ?
– C’est important pour l’Histoire, pour garder le témoignage, pour faire prendre conscience qu’il faut se servir du passé pour mieux gérer le futur. Des dérives autoritaires d’extrême droite ou d’extrême gauche, il peut y en avoir. On est dans une période du monde qui est assez compliquée. C’est important de témoigner, de montrer à quoi peut conduire la haine. Cette haine, elle existe toujours. C’est aussi notre rôle de la combattre et de faire perdurer la paix. Et puis ici dans le collège il y a des gens qui ont des membres de leur famille qui ont été dans le camp de Septfonds. »
La Rédac avec la participation de Cacolac
Image d’entête : Arrivée des réfugiés espagnols au camp de Septfonds, tableau de Josep Ponti Musté (1911-2010), interné au camp de Septfonds. Le tableau est visible à la mairie. Crédits photo : Jean-François Peiré – DRAC Occitanie